Au nom d’Allâh le Trés Miséricordieux, le Tout
Miséricordieux
AVANT PROPOS
Tout homme dans ce monde aspire au bonheur, et à la sérénité et se
démène nuit et jour sans relâche pour concrétiser cette aspiration. Dans
cette vie qui n’est pas sans rappeler un champ de bataille, il poursuit
son effort jusqu’à l’extrémité de sa force, dans l’espoir qu’un jour le
bonheur vienne étendre ses ailes protectrices au-dessus de sa tête, et
qu’à son ombre, il puisse couler quelque moment de joie loin du vacarme et
des soucis.
Mais malheureusement la plupart des individus qui ont apparemment tous
les moyens pour vivre dans la satisfaction totale, sont voués à
l’agitation et aux tourments pour des raisons obscures. Le bonheur leur
apparaît comme une chose impossible, et la vie comme une chute inexorable
vers l’anéantissement et le chaos.
Ce tourment et ce sentiment d’échec sont dûs au fait que ces gens-là
préfèrent l’illusion à la réalité. Et qu’ils ne se servent pas de la
lumière de l’intelligence pour dissiper les ténèbres. L’illusion v oile
leur esprit avec ses faux éclats, et les jette en pâture aux coups du
sort.
Leurs vils desseins, leurs désirs immodérés, les con duisent à une
impasse dangereuse, à des périls effroyables et annihilateurs.
L’homme, ce phénomène composé de deux forces: mécanique et psychique,
est le bien le plus précieux de l’existence.
En plus de sa dimension matérielle dont il partage les contingences
avec l’espèce animale, il a aussi des besoins spécifiques dont la
concrétisation le mènerait à la phase finale de sa perfection.
Le développement de l’une de ces deux capacités dépendra de sa volonté
et de son choix.
Le progrès de la science et de la technologie a radicalement bouleversé
le mode de vie.
L’essor des techniques et l’évolution stupéfiante de toutes les
disciplines, ont facilité la solution des problèmes, et ont fait de
l’ensemble du globe terrestre, depuis les fonds des mers jusqu’à l’espace
sidéral, le champ d’exploration de l’homme.
Parallèlement à ce progrès scientifique, et à la préoccupation
matérielle croissante, nous assistons à une secousse des bases de la foi
et de la piété. Une série de désordres a vu le jour dans les différents
organes de la société, et les statistiques relatives à la criminalité, à
la délinquance et à la dépravation morale, ont atteint des chiffres
alarmants.
Les facteurs de réforme et de changement ont cédé le pas devant cette
vague, et ce qui reste de force morale se consume dans l’obéissance au soi
impérieux, dans la licence et le vice.
Nous assistons aujourd’hui à la suprématie de l’«avoir» sur l’«être»,
du bien matériel sur la vertu, le bien tout court.
L’humanité est équipée de la science alors que l’ange gardien de la
vertu qui devait la préserver de l’égarement est foulé aux pieds par les
forces démoniaques des passions et de la concupiscence, et les sentiments
humains ne tarderont pas à connaître le même sort.
Le mensonge, la cupidité, l’hypocrisie, l’iniquité, l’ambition et tous
les autres vices qui constituent chacun un frein à l’accomplissement et au
bonheur de l’homme, l’enserrent de toutes parts, et polluent son
ambiance.
La disparition des liens de l’unité, les inquiétudes individuelles ou
sociales, en un mot les causes du malheur et de la souffrance, procèdent
de la dégradation des valeurs morales et de la perte du sens de la
vertu.
C’est une réalité amère que si l’on otait à l’homme d’aujourd’hui son
pouvoir sur la matière, il perdrait tout point d’appui dans ce vaste
univers, et serait envahi par le spectre du désespoir, perdant toute
résistance spirituelle, devant la moindre contrainte.
Les savants moralistes et les psychologues sont per suadés que lorsque
les vertus et les qualités morales excellentes se manifestent en l’homme
et que ce dernier arrive à créer un équilibre dans son coeur et sa raison,
il se réalise dans toute sa plénitude.
Ce sont les potentialités morales et spirituelles qui prémunissent
contre le déséquilibre, et élèvent l’homme au sommet de la grandeur, et de
la perfection.
* * *
Les personnalités qui ont émergé dans les diverses sociétés et dont les
noms sont inscrits en lettres d’or dans l’Histoire, ont toutes été d’un
caractère moral impeccable.
Une société sans «armement moral» et non régie par les principes
humanistes est inapte à se perpétuer et à survivre.
La mort des grandes civilisations,et l’effacement des grandes nations
ne sont pas seulement le résultat d’un marasme économique; leur chute a
été entraînée et précipítée par la perte de leur énergie spirituelle. Car
l’ébranlement des fondations morales est bien plus grave et plus
destructeur pour une société, qu’un tremblement de terre.
Les lois et institutions d’origine humaine n’on tjamais pu imprégner
les profondeurs de l’âme, ni cimenter les peuples et les différentes races
dans une unité durable.
Etant donné que le savoir humain est limité, que sa connaissance des
liens des phénomènes de la nature est incomplète et qu’il est s ans cesse
sous l’influence de multiples paramètres imprévisibles, les lois et les
institutions en question, fruit de la pensée positive, se sont révélées
impuissantes à réunir les conditions pluridimensionnelles du bonheur de
l’homme.
Elles sont empreintes d’un caractère transitoire, et varient au rythme
des changements affectant la forme et le fond de la société.
Ces malheurs et ces différents méfaits qui s’étendent de nos jours à
l’humanité entière ne sont en réalité que le reflet de l’insuffisance des
lois et institutions existantes.
Cependant la doctrine des Prophètes qui a jailli des sources sublimes
de l’inspiration, et de l’éclat de la Révélation et de l’illumination, et
qui repose sur la science infinie du Créateur, est à l’abri de la tempête
du changement et de l’altération.
Grâce à sa connaissance parfaite des secrets de la création et des
réalités de l’existence, cette école présente à l’humanité un plan
infaillible pour la perfection, l’édification et l’amendement de soi. Le
rôle des enseignements divins, les résultats éclatants et l’impact rapide,
profond et décisif de cette force religieuse dans l’organisation sociale
est indéniable.
Tant qu’au sein des masses populaires, une disponibilité au bien et une
répugnance au mal, ne se fera pas jour, tant que chacun ne se pliera pas à
la volonté générale, et tant que le sens de la responsabilité ne sera pas
ancré en chacun, toute entreprise de réforme restera ineffective.
Pour fonder une civilisation parfaite, et susciter une ambiance de
sécurité et de plaisir, il n’est pas d’autre voie que d’équiper les hommes
en capital immatériel.
Outre qu’il est un moyen de s’assurer le succès dans l’au-delà,
l’éternel Islam, instauré par la plus grande et la plus vertueuse
personnalité de l’Histoire, sur la base de la foi et de la piété, est
aussi garant de la prospérité et du repos dans ce monde.
L’appel de l’Islam a pour principe, de promouvoir les hommes par
l’inculcation d’une série de croyances pures et de traits éminents, qui
d’après lui, sont à même de conférer la qualité d’homme authentique.
L’Islam est contre l’immolation des dons pour la satisfaction des
désirs et du soi impérieux. Il combat sévèrement ceux qui souillent
l’honneur de l’humanité, et troublent la confiance et l’entente
collective.
Une société qui règle les rapports entre ses individus, sur la base des
principes islamiques, voit règner la pureté, le calme et la sincérité dans
toutes ses affaires.
La loi y est la même pour tous.
En s’inspirant de tels facteurs de communion spirituelle, de pareils
enseignements et projets d’accomplissement, on pourrait provoquer une
réforme universelle dans les habitudes et l’éducation. Cette réforme
répondrait à l’aspiration de tous les hommes, de jouir d’un calme
permanent.
* * *
Dans ce livre que le cher lecteur a sous les yeux, une série de sujets
moraux ont été étudiés, une partie en est consacrée à l’examen des
enseignements précieux de l’Ethique islamique.
Bien que chaque livre traitant de morale, chaque ouvrage consacré à la
sagesse pratique et tout l’héritage des grands hommes constitue un trésor
inestimable, nous avons jugé qu’il n’était pas sans intérêt d’aborder le
même sujet sous un angle plus concret, et avec un style plus facile à
comprendre par un plus grand nombre.
Car les ouvrages anciens ne sont pas en règle générale à la portée du
lecteur moyen, et leur aspect académique et théorique en restreint la
lecture aux spécialistes.
L’auteur s’est attaché à traiter les sujets de la morale de façon
accessible, sans recourir à une terminologie spécialisée ou à des concepts
hermétiques pour le lecteur moyen. Il établit à chaque fois qu’il le juge
nécessaire, un lien entre le problème moral et son pendant psychologique
ou pédagogique, par une analyse scientifique, exposant les thèses des
penseurs occidentaux et les confrontant avec les textes religieux et
traditionnels, et les paroles des Imams qui ont précédé de plus de 13
siècles, celles des savants modernes.
Il est à propos que j’ajoute ici un point pour rappeler qu’une partie
de ce livre avait été publiée séparément dans la revue «Maktabé Islam» (La
doctrine de l’Islam) paraissant à Ghom.
Nous formons le voeu que Dieu nous accorde l’aptitude de nous conformer
aux recommandations, exhortations et orientations des grands hommes de
l’Islam et des savants en science morale, et que nous frayions ainsi la
voie à notre propre réforme, à notre libération du joug des instincts
destructifs pour vivre paisiblement dans la félicité.
* * *
Seyed Mojtaba Moussavi Lari.
Ghom
Farvardin 1345-Mars 1966
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