CHAPITRE 19
La science de l'Imam concernant
l'Islam
L'Imam est doté par Dieu -pour lui permettre d'accomplir sa mission- de
toutes les connaissances nécessaires: il connaît les besoins des hommes
dans tous les domaines, et connaît les voies et moyens pouvant assurer le
bonheur des hommes dans les deux mondes.
Cela s'explique par le fait que sa personnalité est le prolongement de
la personnalité du Prophète: s'il ne reçoit pas la Révélation comme ce
dernier, il a néanmoins le devoir de com menter et de clarifier les
enseignements coraniques, à chaque époque et en toutes
circonstances. De telles connaissances ne peuvent être qu'inspirées,
accordées par la grâce divine. Un esprit ordinaire procédant par déduction
rationnelle est trop limité pour pouvoir embrasser toutes les
connaissances, et n'est pas préservé de l'erreur, ou de
l'insuffisance.
Comment un homme, source de toutes les effusions divines pourrait-il
être sujet à l'erreur, où à l'insuffisance du savoir? Sa fonction
exige qu'il soit à tout moment prêt à répondre aux demandes et aux appels
des hommes dont les besoins sont sans cesse changeants. Les hommes ne
peuvent être abandonnés à eux-mêmes sans direction, sans autorité de
référence. Dieu a institué l'imamat précisément pour que les hommes ne
puissent pas invoquer l'absence de référence à leur foi, au Jour du
Jugement Dernier, et qu'ils ne s'autorisent pas à interpréter à leur guise
la parole divine révélée aux prophètes.
Le savoir des hommes n'est en général qu'un ensemble d'opinions, et ne
revêt jamais le caractère définitif. L'imam la'far al-sâdeq, a
dit: "Dieu -Qu'Il soit Exalté- a clarifié Sa religion par les imams de
la guidance de la Famille de notre Prophète. Il leur a ouvert largement
les voies de Son enseignement; et c'est par eux qu'Il a révélé les
mystères des sources de Sa science. Quiconque, parmi les membres de la
communauté de Mohammad -que les salutations divines soient sur lui et sur
sa Famille- reconnaît les droits de son imam, goûtera à la douceur de la
foi et connaîtra la maturité de son islam.
Car Dieu -Exalté soit-Il- a instauré l'imam comme un signe pour Sa
création, et Il en a fait une preuve. C'est Dieu qui lui a conféré la
couronne de la dignité, et l'a enveloppé de la Lumière de la
contrainte. L'imam a le moyen d'accéder aux mystères célestes; ses dons
ne sont jamais interrompus. On ne peut obtenir de faveur divine que par
son intermédiaire; et Dieu n'agrée les oeuvres des hommes qu'à condition
que ces derniers connaissent leur imam. Les imams connaissent par
avance les voiles de l'obscurité, les pratiques douteuses, et les
séditions confuses. Dieu -Exalté soit-Il- les a choisi dans la progéniture
de l'imam al-Hossein, imams de père en fils, en les préparant à cela par
la purification de leur âme et le perfectionnement de leur intelligence.
Il les agrée comme guides pour Sa création. A la disparition d'un imam, il
le fait remplacer par un de ses fils savant, discernant le vrai faux,
guidant les hommes, éclairé, et argument de Dieu contre Ses créatures.
Ils sont les imams venus de la part de Dieu, ils guident par la Vérité
et s'y conforment, ils sont les preuves de Dieu, Ses apôtres, et Ses
gardiens pour Sa création. Les serviteurs de Dieu pratiquent Sa
religion grâce à la guidance des imams; et les contrées s'éclairent par
leur lumière, et les espèces prolifèrent grâce à leur bénédiction. Dieu en
fait une source de vie pour les hommes, des flambeaux pour les ténèbres,
des clefs pour la parole, et des piliers pour l'islam. Les volontés
divines les traversent avant d'atteindre forcément leurs cibles."157
*
L'imam Mohammad al-Bâqer a dit pour sa part: "Dieu possède une
science réservée et une science commune. La science réservée est celle
dont Il n'a pas révélé la teneur aux Anges rapprochés, aux prophètes et
aux envoyés. Sa science commune est celle qu'Il a fait connaître aux Anges
rapprochés, aux prophètes et aux envoyés. Elle est parvenue à Nous par
l'intermédiaire de l'Envoyé de Dieu.158
Le Cheikh al-Sadûq rapporte dans un ouvrage intitulé Ma'âni
al-Akbar, que l'imam Moussa ibn Ja'far a dit: "J'en jure par Dieu,
Nous avons reçu tout ce qui a été accordé à Salomon, ainsi que ce qui ne
lui a pas été donné, et n'a été donné à nul autre dans les univers. Dieu a
dit à propos de Salomon: "Voici notre don: dispense-le et garde-le
sans compter!"
Coran, sourate Sâd, verset 39
Et il a dit à propos de Mohammad: "...Et ce que l'Envoyé vous
apporte, prenez-le! Quant à ce qu'il vous interdit, abstenez-vous en!"
Coran, sourate Le Rassemblement (Al-Hachr), verset 7
L'imam al-Sâdeq a dit que l'expression "Celui qui détient la science du
Livre" qui se trouve dans le Coran désigne l'imam Ali. On lui demanda de
montrer la différence entre la science de ce dernier, et celle de "Celui
qui a une science du Livre", autre expression coranique. Il
répondit: "Le savoir de celui qui a une science du Livre, par
comparaison avec celui qui détient la science du Livre, est comparable à
la charge d'eau que peut prendre sur son aile un moustique par rapport à
l'eau de la mer."159
L'Emir des croyants, Ali, a dit: "La science qu'a menée Adam, du
Ciel à la Terre, et toutes les grâces qui furent accordées à tous les
prophètes jusqu'au dernier d'entre eux, se trouvent dans la Famille du
Sceau des prophètes."160
Koleyni rapporte cette parole de l'imam al-Bâqer: "La science qui a
été apportée par Adam, n'est pas remontée au ciel. Elle se transmet par
héritage. Ali était le savant de cette communauté. Aucun savant d'entre
nous -les Gens de la Maison- ne meurt sans être aussitÔt remplacé par
quelqu'un des siens qui soit aussi savant que lui ou suivant ce que Dieu
veut"161
Dans le Nahuj al-Balâghua, nous pouvons lire ces propos
qu'adresse l'imam Ali à son compagnon Kumayl ibn Zyad: "Certes, la terre
n'est jamais en manque d'un homme qui soit la preuve de Dieu, que cet
homme soit apparent et connu ou qu'il soit prudent et occulté, et ce afin
que les arguments de Dieu et Ses démonstrations ne deviennent pas
caduques. Combien sont-ils et ou sont-ils?
Par Dieu ils sont très peu en nombre, mais leur mérite auprès de Dieu
est immense. Par eux, Dieu préserve ses preuves et arguments afin qu'ils
les confient à leurs homologues et les sèment dans les coeurs de leurs
semblables. La science a déferlé sur eux en toute réalité pénétrante; ils
ont rencontré l'Esprit de certitude; ce qui semblait difficile aux
injustes leur paraît aisé; et ils sont familiers de ce qui effraie les
ignorants. Ils sont dans le monde avec des corps dont les esprits sont
suspendus au Plérôme suprême (des Anges). Ils sont les califes de Dieu sur
terre, les apôtres de Sa religion."162
*
En plusieurs occasions, -comme en témoigne l'histoire- les
pseudo-califes ont été contraints de faire appel à l'imam Ali afin qu'il
leur donne une solution religieuse aux nombreux problèmes qu'il
rencontrait. Par contre, jamais l'histoire ne fait mention d'un seul cas
où l'imam Ali se serait référé à quelqu'un d'autre que lui-même afin de
l'aider à résoudre tel ou tel problème de la connaissance de l'islam.
Dieu dit dans le Coran: "Celui qui guide vers la Vérité n'est-il
pas plus digne d'être suivi que celui qui ne peut guider qu'à moins d'être
lui-même guidé?"
Sourate Jonas (Younas). verset 35
Les actions du guide, ainsi que ses idées doivent servir de critère
pour la connaissance des lois et prescriptions de l'Islam. Quel péril un
homme incompétent ne fait-il courir aux musulmans, en prenant par la
force, la responsabilité de leurs affaires?
La conscience normale peut juger, sans aucune objection possible, que
celui qui est digne d'être suivi et obéi est celui qui connaît le plus le
chemin, qui est familier de la Vérité. Le célèbre compagnon des imams,
Hichâm ibn al-Hakam allait un jour se rendre chez l'imam Ja'far al-Sadeq,
accompagné de Burayha et d'une femme. En cours de route, ils rencontrèrent
Moussa Kâzim, le fils de l'imam Ja'far. Hichâm le mit au courant de la
cause de la visite qu'il allait rendre à son père l'imam Ja'far; et lui
présenta Burayha, qui était un savant chrétien.
Moussa ibn Ja'far demanda à Burayha: "Quelle est la connaissance que
tu as de Ton Livre (c'est-à-dire de l'Evangile)?" Burayha répondit:
"Je le connais parfaitement" Moussa ibn Ja'far lui demanda: "Comment
établis-tu la confiance dans l'interprétation que tu en fais?" Burayha
dit: "Qu'est-ce qui pourrait bien compromettre le bien-fondé de mon savoir
de l'Evangile?" Moussa commença alors à lui réciter
l'Evangile. Burayha s'exclama: "C'est toi que je cherche depuis
cinquante ans, ou quelqu'un comme toi!" Il embrassa l'islam aussitôt, et
la femme qui l'accompagnait en fit autant.
Quand ils entrèrent chez l'imam Ja'far al-Sâdeq, Hicham le mit au
courant de ce qui venait de se passer. L'imam Ja'far récita alors ce
verset du Coran: "Descendance les uns des autres, et Dieu est
Audient et Savant."163
Burayha lui demanda: "Comment avez-vous la Tora, l'Evangile et les
livres des prophètes?" L'imam lui dit: "Nous les avons par héritage de
leur part, nous les lisons comme ils les lisaient, et nous les prononçons
comme ils les prononçaient. Dieu n'instaure pas sur Sa terre une Preuve
qui répondrait "Je ne sais pas" lorsqu'on lui pose une question."164
De même le Cheikh al-Sadûq rapporte dans son livre 'Uyûn akhubâr
al-Ridha, le célèbre débat qui eut lieu entre l'imam Réza et des
interlocuteurs juif, sabéen, chrétien, zoroastrien, chacun occupant une
position éminente dans sa religion, ainsi que des théologiens musulmans à
propos de questions religieuses et philosophiques.
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