Chapitre II LA RAISON ET LA CONSCIENCE
Il est évident que Dieu a semé dans l'esprit de tout être humain les
germes de penchants différents, chacun de ces penchants ayant un rôle
particulier à jouer dans la promotion de la créature humaine et dans son
bonheur ici-bas, sans oublier que le grand élan vital qui anime tout
individu est le fait même de ces penchants qui émanent du plus profond de
son être. L'homme ne peut pas trouver la voie du bonheur rien qu'en se fiant à son instinct naturel et en le suivant. Il est certain que l'animal peut lui se raporter à ses instincts pour ordonner et organiser sa vie. C'est ainsi que chacune de ces espèces non-humaines est régie uniquement par les lois de l'instinct et peut se passer de l'éducation et de l'enseignement pour concevoir sa manière propre d'exister. Mais l'instinct ne peut, à lui seul, comme dans le cas de l'animal, le prémunir contre les errements et les fautes, la raision étant pour lui le premier guide, à la différence des animaux; c'est elle qui lui indique la voie à suivre pour une existence honorable. C'est par la raison et la réflexion que l'être humain pourra trouver la voie de son bonheur et qu'il avancera vaillament et inébranlablement dans cette voie. L'être humain est, de ce fait, confronté intérieurement à une guerre
implacable entre ses instincts et sa raison, chacune de ces forces tendant
à annihiler l'autre. Il importe donc pour atteindre l'équilibre interne
nécessaire à chacun, que nous soumettions nos instincts à la raison car
celle-ci, en tant que capital, devra être investie dans la capacité à
percevoir les dangers dans leur réalité et à les éviter afin de parvenir à
l'ordonnancement de nos existences. Selon le professeur Karl: "Nous n'avons toujours pas compris que nous sommes tout autant soumis
aux lois de la cinétique et de la physique que nous devrions l'être
vis-à-vis ses lois de la vie, il y a donc une lutte âpre entre la liberté
de l'homme et les lois de la nature, lutte dont l'homme est aujourd'hui la
victime. Car l'homme veut une totale liberté, mais il ne peut profiter de
cette liberté dans les limites des zones interdites sans éviter les
dangers qui l'y guettent. La contradiction qui existe entre la liberté de l'homme et les lois naturelles nécessite un exercice spirituel afin d'éviter d'encourir les dangers de l'existence. Nous devons donc combattre maints penchants et maints désirs, car sans un minimum de sacrifices nous ne pourrions nous adapter à l'ordre naturel du monde, car il semblerait que le secrifice fasse partie des lois de l'existence. Le fait même de s'abstenir d'assouvir certains de nos désirs nous permettra de préserver nos forces et notre volonté, car sans continence et sacrifices la vie ne serait pas aussi belle, aussi sacrée ni aussi grandiose. Chacun doit faire les sacrifices qui s'imposent à lui, car le sacrifice est une nécessité de la vie des hommes. Cette nécessité s'est matérialisée à partir du moment où la libre raison a supplanté l'instinct pressant qui régissait la vie de nos ancêtres. Quelle que soit la volonté de l'homme, s'il donne libre cours à sa liberté, il ne pourra qu'enfreindre les lois naturelles et s'exposer ainsi à de sévères représailles."1 La raison est un des grands bienfaits de Dieu envers l'homme dans Sa volonté de l'honorer: "Dis: c'est Lui qui vous a produits et vous a assigné l'ouïe et les yeux et les coeurs. Pour peu que vous soyez reconnaissants."2 L'Emir des Croyants L'imam Ali (que le salut soit sur lui) dit un jour: "La meilleure chance de l'homme est sa raison, s'il est humilié elle l'honore; s'il chute elle le relève; s'il se perd elle le guide; s'il parle elle dirige ses paroles."3 L'Islam a décrit la raison comme étant l'argument intérieur. c'est ainsi que s'exprime l'Imam Kadhem (que le salut soit sur lui). "Dieu a envers les hommes deux arguments: l'un énoncé et l'autre tacite. L'énoncé étant les prophètes, envoyés de Dieu et Imams. Le tacite étant la raison."4 Mais, du fait de l'inégalité de la raison parmi les gens et la différence qui caractériser leur perception, chacun ne sera redevable, le jour du jugement dernier, que de sa propre raison ainsi que le rapport l'Imam Bâqer (que le salut soit sur lui): "Dieu ne jugera les hommes le jour de Jugement Dernier qu'à l'aune de la part de raison dont Il les aura dotés durant leur existence."5 Aujourd'hui, l'Humanité est séduite par les résultats extraordinaires qui découient de la raison, faisant des découvertes scientifiques le but ultim de la vie. Partant de là, elle a assénée un coup terrible au rôle que devait jourer la raison dans la vie de l'homme. Cette attitude exclusiviste est devenue cause du désintérêt envers cette force qui est en relation directe et étroite avec le principe de l'existence même et de toutes les questions spirituelles. Si cet être, leurré et trompé, pouvait étendre son horizon et accéder aux grands espaces qui échappent à l'oeil en adoptant une autre démarche, il ne serait pas convaincu par les merveilles matérielles, oeuvre de l'esprit humain. L'Islam a, en cela, une vue plus générale concernant la raison et son champ d'application pour la soumettre à son éducation et l'orienter vers les vérités de l'existence de manière claire et précise. Le Coran appele la raison à ne pas suivre une voie qui ne lui apparaît pas clairement et à ne point admettre toute chose sans preuve établie: "Et ne cours pas après ce dont tu n'as science aucune. L'ouïe, la vue et le coeur: sur tout cela, en vérité, on sera interrogé."6 Cette déclaration appuie la thèse de la nécessité d'une étude approfondie de chaque sujet avant de s'en convaincre et apporte un meilleur éclairage sur les erreurs de ceux qui ne fondent leurs pensées que sur la croyance et les illusions plutôt que la science et la réalité: "Ils ne font que suivre le doute. Mais le doute ne peut remplacer la vérité en rien."7 Par la méthode posée du raisonnement scientifique, démolit les fondements des raisons qui se fondent aveuglément sur l'imitation et le doute et attire l'attention des imitateurs sur le fait que cette pratique qui nous viens de nos pères et ancêtres n'est qu'égarement: "Ils disent:: Non, mais nous suivrons ce à quoi nous avons trouvé nos ancêtres. Quoi! Même si leurs ancêtres ne comprenaient rien et n'étaient pas bien guidés?."8 Cette guidance et cette volonté de montrer la voie vise à ouvrir les
yeux et à corriger l'engagement de la raison en chassant les doutes, ce
qui aménera la raison à plus de discipline dans son activité et ménera à
regrouper les différentes forces et idées qui lui sont assujetties. A ce sujet, Spinoza écrit: "Le plus haut que notre raison peut atteindre est l'idée de l'existence de "Dieu" c'est-à-dire cette existence absolue et infinie sans laquelle rien ne serait et même ne se concevrait. De ce fait, ce qui serait bénéfique à la raison, si peu qu'il soit, est de savoir que Dieu existe. Aussi que la raison agit en conséquence de ce qu'il sait. ainsi, nous pouvons dire que la vertu suprême de la raison est l'entendement ou plutôt la compréhension. Cependant, nous avons démontré plus haut que le point culminant de la pensée est l'idée de .Dieu', ce qui nous amène à dire que la vertu suprême de la pensée est la connaissance du Créateur."9 L'objectif du penser en Islam est de corriger la raison de l'être
humain et de fonder la vie sur des principes de justice et d'équité, car
lorsque l'homme aura atteint un résultat dans la réflexion, il l'aura
atteint par sa propre pensée; il aura alors à la transposer de l'état de
force à l'état d'action pour en bénéficier quotidiennement. Il est donc
nécessaire pour le Croyant d'assumer l'ensemble de ses actes, de ses
sentiments et de ses pensées et qu'il entreprenne une lutte continue pour
vaincre les déviations qui affecteraient la valeur intrinséque de l'être
humain. Dieu dit: "Bien au contraire, ceux qui prévariquent suivent leurs propres passions sans savoir".11 Puis, Il ajoute: "Si la vérité suit leurs passoins, certes les cieux et la terre et ceux qui y sont seraient dans le désordre"12 Enfin: "En bien, le vois-tu celui qui prend sa passion pour son Dieu? Si Dieu l'égare sciemment..."13 Le Cheikh Saddouq rapporte dans son livre: "Le sens des nouvelles" qui le Prophète (que le Salut de Dieu soit sur lui) a adressé la parole à ses compagnons qui revenaient du champ de bataille en ces termes: "Bienvenue aux gens qui ont accompli le petit Djihad et qui doivent encore accomplir le grand Djihad. On lui demanda: Ô Prophète, qu'est-ce que le grand Djihad? Il leur répondit: Le Djihad de l'Ame."14 Il en ressort donc que ne pourra prétendre à la grâce du Seigneur que celui qui aura pu contrôler ses mauvais penchants et qui n'aura pas laissé ses désirs dominer sa raison, versant ainsi dans la mauvaise voie: "Et pour celui qui aura redouté d'avoir à se tenir debout devant son Seigneur et préservé son §me de la passion, alors oui, le Paradis! Ce sera le refuge."15 La conscience et les instincts refoulés La conscience morale est un facteur important dans la régulation des
pulsions de l'âme. C'est ainsi que l'homme, depuis les temps les plus
reculés de son apparition sur la terre, n'a cessé de faire le bien pour le
bien et d'essayer d'éviter le mal, prêtant l'oreille à cette voie
intérieure qui s'appelle la conscience, car sa vie spirituelle a toujours
été tributaire de sa conscience et de son âme. Quant l'homme jouit d'un bon équilibre intérieur, il ne peut qu'être
juste et loyal, s'écartant des voies du mal et de la traîtrise. Il en est
de même de la conscience qui est l'élément révélateur de la réalité. De ce
fait, tout ce que l'homme perçoit du monde qui l'entoure, il le comprend
comme des signes qui lui parviennent de son environnement et qui sont
dissociables de son esprit. Tandis que la réalité qui émane de son for
intérieur est perçue par lui comme étant plus proche de son âme que ce
qu'il appréhende du monde extérieur par l'oeil ou l'ou ie; il s'aperçoit
alors que cette réalité fait partie de sa conscience et en est
indissociable. Freud, dans ses études de psychologie analytique, recherchait les
racines de l'âme sans se préoccuper des autre éléments qui déterminent les
comportements et agissements malsains. Lorsque Freud, dans ses écrits sur le comportement moral, nie la
conscience, rabaissant l'homme à un ensemble d'instincts et de penchants,
il ne fait que réfuter tout naturellement toutes les valeurs morales et,
plus encore, il passe sous silence toutes les tendances au bien qui
oeuvrent profondément à modeler la nature humaine. En conséquence, le
bien, l'entraide et le soutien qu'apporte le puissant au faible ne sont, à
ses yeux, que des formules dénuées de sens. Les chantres du réformisme, a travers l'histoire de l'Humanité, ont, de
tous temps, appelé les gens à plus d'honnêteté, ce qui amène à croire que
ceux-ci n'ont pas suivi leurs chefs par peur de leur force, mais plutôt
par conviction. Les limites des jugements de conscience Il est rare que la conscience se trompe dans ses jugements, alors que
les erreurs que commet l'homme dans sa vie sociale ne sont que la
conséquence de la mauvaise perception de ses sens ou de son entendement
dans l'analyse des faits ou de la faible résistance qu'il oppose aux
désirs qu'il porte en lui et à ses mauvais penchants. La conscience n'est pas seulement un guide sûr au plan de la vie
quotidienne, mais elle est également le témoin de nos actes qui contrôle
tout au long de notre vie et nous rapporte nos faits et gestes. Aussi, il
est possible que l'homme puisse s'exprimer en contradiction avec son
coeur, ou qu'il maîtrise totalement ses actions, ne laissant rien
transparaitre de ses moindres pensées, mais il ne pourra rester sourd,
indéfiniment, à l'appel qui émane du plus profond de son être ou qu'il
n'entende pas le cri de réprimande qui l'interpelle. Il est impossible de
neutraliser totalement la conscience. Même si elle semble s'assoupir
pendant un certain temps, il arrivera qu'un jour elle se réveille pour
évaluer les actions de chaque être. Elle finira par rendre les jugements
mesurés à l'aune du bien et du mal pour chacune des actions et punir en
conséquence. Cependant, si les atteintes qui touchent l'homme sont au-dessus de ses
forces et triomphent de sa résistance, la conscience sera alors
profondément ébranlée, ce qui pourrait, au vu de l'emprise qu'elle exerce
sur l'esprit, causer ce que l'on appelle communément des maladies
psychologiques ou psychopathologiques. Selon Henri Baroque: "La force de résistance de la conscience est peu commune, car même lorsqu'on ne la perçoit pas, elle demeure en éveil. Et lorsque cette situation devient critique, elle recommence à s'exprimer de nouveau."16 Finalement, on peut affirmerque quiconque n'écoute pas la voix de sa conscience ne peut que s'écarter du droit chemin et connaître les tourmentes de l'âme et les troubles de l'esprit. Par contre, que tous ceux qui écoutent cette voix ne pourront que jouir d'un bon équilibre et d'une bonne santé psychologique. Et c'est cela, précisément, que recherche vainement tout être humain égaré. Le Coran et l'appel des instincts Nombre de savants estiment, aujourd'hui, que la théorie de Freud est dépassé et que la conscience fait partie d'un tout qui est l'homme. Les penseurs qui ont eu à étudier ce que recèle la raison et la nature humaine de droiture ne cessent, dès lors, de souligner le phénomène de la conscience et la tendance de chaque être à faire le bien de manière innée. De même, le Coran insiste sur cet aspect à travers ses versets et relève cette capacité de l'homme à faire la différence entre le bien et le mal: "Et par l'âme et comme Il l'a ordonnée en sorte qu'lllui a inspiré son libertinge de même que sa piété."17 Selon Jean-Jacques Rousseau: "Il est vrai que l'homme, tout homme, ne recherche rien d'autre que son
propre bonheur. Mais nous ne devons pas oublier qu'il y a un bonheur moral
qui découle des plaisirs spirituels et pour lesquels les meilleurs se
sacrifient. C'est pour cela que nous disons que les premiers sont des
hommes sans coeurs qui n'oeuvrent que pour le profit matériel pour
eux-mêmes. Ainsi donc, l'activité de la conscience n'a aucun lien avec les
jugements de la raison, mais elle est plutôt la résultante d'un certain
sentiment inné. Et à supposer que nous ne puissions atteindre la nature
même de la consience par nos propres moyens, du moins nous pouvons en
ressentir la présence et l'existence de manière profonde. Quand au Professeur Friedman, il rapporte les observations suivantes: "L'appel de la conscience fait partie de la personalité humaine, car rien ne vient par l'éducation et l'enseignement. Et quiconque parvient a une position dans la société ou devient l'un de ses dirigents ne doit être guidé que par sa conscience pour agir au mieux et éviter l'erreur."19 Selon un autre psychologue: "La conscience n'est pas un réflexe artificiel. Elle est un élément
humain naturel et profond. Car l'homme ne peutquelque soit son
désir-étouffer ou enterrer sa conscience. Ainsi, le fait que la conscience
résiste aux plus graves maladies et même aux atteintes de l'âme et à la
folie et persiste après l'extinction de la raison ne fait que renforcer la
conviction que la conscience occupe une grande place et un rang élevé dans
l'âme humaine. Dieu Lui-Même, après nous avoir rappelé les dons qu'Il nous faits, celui de la vue, du parler et de la raison, rapporte Son orientation de l'homme vers le bien et le mal par ces paroles: "Ne lui avons-Nous pas assigné deux yeux et une langue et deux lèvres? Et Nous l'avons guidé aux deux voies."21 Ceci ne nous démontre-t-il pas que l'homme a appris la distinction entre le bien et le mal à l'école de la création: "Oui, c'est Nous qui créons l'homme d'une goutte de mélange de sperme pour l'éprouver. Nous l'avons donc fait entendre et voir."22 Samuel Smiles nous dit: "Les grands esprits et les idées sublimes sans la conscience qui les
guide et les oriente ne sont que des éclairs vifs qui peuvent aveugler
l'homme et causer sa porte. Car la conscience est cet élément qui le
maintient ferme et droit et l'empêche à s'écarter de la bonne voie. Il est dit dans le Coran: "Non, J'en jure par le jour de la Résurrection! Mais non.'J'en jure par l'âme grande réprimandeuse!"24 Dans ce verset, Dieu nous rappelle cette voix intérieure qui nous vient du tréfonds de nous-mêmes et qui nous reproche nos pêchés et nos fautes, à savoir ce que Dieu appelle "l'âme grande réprimandeuse". Cette force intérieure qui nous réprimande et qui les psychologues ont appelé la "conscience". Selon le professeur Otto Friedman: "Il n'est pas rare de remarquer que beaucoup de person nes passent du
temps dans les bars ou les auberges, à consommer des boissons alcolisées,
ou alors parient leur argent, ou bien jouent au tennis, sans pour autant
éprouver du plaisir, car elles souffrent de maux intérieurs. C'est-à-dire
qu'elles entendent une voix qui vient d'eux-mêmes et qui les réprimande et
leur dit: Tu passes ta vie à ne rien faire! Et cette voix n'arrête pas de
retentir dans leur conscience. Il peut arriver, parfois, que l'homme se trompe et se livre à ses penchants, ce qui le fera souffrir et regretter toute son existence d'avoir eu ses instants de faiblesse. Il se sentira alors malheureux et abattu, comme le dit le Calife Ali (que le salut soit sur lui): "Combien le plaisir d'une heure a-t-il engendré de longue tristesse."26 La communauté humaine a toujours tiré profit de la conscience, tout au long de son histoire. Mais pour ceux qui n'éprouvent aucun sentiment et qui n'ont aucune conscience, que ne font pas la différence entre le bien et le mal et qui passent leur vie durant à manger, à dormir et à assouvir leurs désirs, ces personnes-lá sont esclaves de leurs impulsions et de leurs instincts bestiaux; elles sont comme une planche dont se jouent les vagues. De ce fait, la société qui les abrite ne peut aucunement compter sur eux. Car lorsqu'on confie une mission qui nécessite de celui qui en est de la conscience, il est important de s'assurer que celui-ci est guidé par elle. Il serait aberrant et irraisonable de confier cette tâche à une personne dont on sait qu'elle n'obéit point à sa conscience, encore moins à celle qui l'ignore et va à son encontre. L'Islam, à ce propos, a donné une importance toute particulière à la conscience et insisté sur le fait que l'élévation de l'âme par la réflexion et le travail individuel et social résulte de l'obéissance à la conscience. L'Islam oeuvre, par ses principes, à cultiver dans l'âme humaine une tendance à éviter de nuire aux autres, même dans les moments de colère et de frustration. Il avertit, à travers le Coran, les gens d'agir ainsi: "(...) Et que la haine d'un peuple ne vous invite pas à ne pas faire l'èquitè. Faite l'équité: c'est plus proche de la piété."27 Cela signifie qu'il n'est permis à personne, pour quelque raison que ce soit, d'agresser les autres et de fouler aux pieds leurs droits. La loi interdit à l'homme de commettre des infractions à son encontre,
par le seul pouvoir qu'elle a à son égard et du fait des moyens limités
qu'elle possède. Par contre, l'Islam, à travers l'intérêt qu'il porte à
l'éducation de la conscience de ses adeptes, fait que ceux-ci per
çevoivent par eux-mêmes la nécessité de s'abstenir de certaines actions
afin de se rapprocher spirituellement de leur Créateur. Nul doute que ce
sentiment, cette attitude morale et cette foi offrent plus de quiétude à
l'homme et concourent aux objectifs de l'éducation. Selon l'Imam Sâdeq (que le salut soit sur lui), le Prophète (que le Salut de Dieu soit sur lui) disait: "Le croyant a envers ses semblables sept responsabilités que lui impose Dieu Tout Puissant: le respecter, l'aimer, le réconforter dans ses biens, veiller sur lui en son absence, lui rendre visite en cas de maladie, assister à son enterrement et ne dire de lui que du bien après sa mort."28 L'homme obéit done à son innéité et fait la distinction entre le bien et le mal tant que cette innéité n'est cachée par rien. Tandis que la conscience enchaînée par les penchants et les désirs inassouvis ne peut aucunement rendre compte de sa réalité. De ce fait, lors d'évènements brutaux, tels les guerres et les troubles révolutionnaires, la conscience est rudement ébranlée et peut même s'arrêter de fonctionner. De même que les fausses convictions qui sont les plus puissants moteurs de l'homme, peuvent atteindre durablement la conscience et, par conséquent, causer d'irréparables dégâts à l'humanité toute entière. La différence qui existe entre un homme qui est doué d'une conscience
et un autre qui n'a aucune conscience est semblable à la différence qui
sépare le ciel de la terre. Car l'affrontement et le désaccord qui
existent entre ces deux types d'homme sont plus acharnés que ceux pouvant
exister entre l'homme et tout autre créature sur terre. La société ne peut instaurer une véritable justice sociale que si les hommes qui la composent sont portés par un élan de l'âme qui les guide et les pousse dans la voie du bonheur, et de l'honneur et auquel ils obéissent. Si les hommes faisaitent partie d'une seule nation constituant une véritable entité, celle de leur humanité, le problème ne se poserait plus de cette façon, car ils seraient alors comme les différents organes d'un même corps ou bien comme les pièces d'une seule et même machine. Le fondements de la raison et de la consciencee Lorsque les penchants et les désirs refoulés tendent à briser la raison et la conscience et à asservir l'homme, la "foi" devient alors le refuge le plus sûr pour tout être humain, La foi est donc le capital de la raison et de la conscience et leur plus grand protecteur. Raison et conscience peuvent, sous sa protection, refouler les assauts de nos désirs et briser leur élan; elles sont comme les murailles d'une forteresse que prendraient d'assaut la horde des mauvaises tendances qui seraient vaincus dans tous les cas, Ainsi, le Coran comparte-t-il l'homme, qui est paré de l'armure de la foi, en ces termes: "(...) tandis qui'il croit en Dieu, saisit alors l'anse la plus solide, sans brisure."29 La mission de la raison théorique, fondement des sciences théologiques,
mathémaiques et naturelles, est de rendre des jugements d'ordre pratique.
Tandis que la raison pratique, fondement des sciences de la vie, son champ
d'investigations est la fonction et l'oeuvre de l'homme. Ainsi, la méthode
pratique que choisit l'homme durant sa vie relève des jugements de sa
raison pratique. Ce qui ressort clairement des textes islamiques c'est qu'ils décrivent les désirs comme les ennemis de la raison, partant de l'observation qu'ils affaiblissent le pouvoir de la raison et diminuent sa force de persuasion. A ce sujet, le Prophète (que le Salut de Dieu soit sur lui) nous dit: "Ton plus dangereux ennemi est l'âme qui est en toi."30 Selon l'Imam Sâdeq (que le salut soit sur lui). "Le désir est l'ennemi de la raison". Quant au Calife Ali (que le salut soit sur lui), il dit: "Les raisons chautent généralement sous la pression des désirs".31 Cependant, si la piété est présente, elle pourra contenir les désirs et les refouler, ce qui aura pour effet de libérer la raison et de lui ouvrir le chemin de l'âme. Partant de là, nous pouvons appréhender les effets de la piété sur la clairvoyance de la raison et son jugement. Le Prophète (que le salut de Dieu soit sur lui), citant les qualités du croyant, nous dit: "Il ne fréquente pas celui qui éprouve de la haine et ne cause pas de torts à celui qu'il affectionne; il n'agresse ni ne provoque; il n'approuve pas le mal fait par ses amis et ne repousse pas l'équité qui est l'oeuvre de ses ennemis."32 Si Dieu a accordé à l'homme la raison et la conscience, qui sont son
grand capital, Il l'a laissé libre de ses choix quant à la manière d'en
tirer profit. Cette liberté totale n'exclut pas que l'homme doive réprimer
certains de ses instincts naturels pour asservir sa nature à l'autre
partie de son être qu'est la raison et la conscience. Le problème se pose, cependant, lorsque l'obéissance à la conscience et
à la raison nécessite de réprimer un désir, car il arrive très souvent que
la volonté soit brisée par la force d'un désir
irrépressible. Arguties, prétextes et fausse rhétorique L'obéissance à la raison et à la conscience et aux impératifs de
justice et d'équité ne sont pas des sujets obsolètes. C'est ainsi que nous
pouvons observer que beaucoup d'hommes qui n'ont pas cette capacité
d'entendement et de perception de la réalité qui les rendrait accessibles
à la raison et à la conscience leur intimant de dépasser les intérêts
personnels égoïstes au nom des responsabilités morales et religieuses ne
se sentent nullement concernés et ne consentent aucunement à supporter les
conséquences des sacrifices à consentir. Ces hommes ne feront que se
fourvoyer tout au long de leur vie et violenter leur conscience pour
finalement recourir à la pratique d'une raison tronquée et d'une pensée
écartelée. Il est d'autres personnes qui chercheront à fuir leurs responsabilités et à nier leurs erreurs en les rejettant sur les autres. Ces personnes, tout au long de leur existence, tenteront de se justifier et de forger des raisons et des arguments pour se couvrir et se tirer d'affaire en préservant au mieux leurs intérêts personnels.Ces arguties et ces raisons fallacieuses que présentent ces personnes nous apparaissent comme autant de preuves et d'arguments en leur défaveur, car ils ne font que se référer à ces mensonges dans leur comportement avec la société pour justifier de leurs attitudes criminelles. A ce sujet, Dale Carnegie écrit: "J'ai en ma possession certaines lettres très intéressantes et
amusantes qui me viennent du directeur de la célèbre prison de Sing-Sing
et qui me dit: Peu sont les criminels à Sing-Sing qui se voient comme des
êtres nuisibles, mais plutôt comme tous les gens pacifiques. Ils
justifient et expliquent leurs actes et avancent les raisons et les
motivations à l'origine de leurs méfaits. Ils avouent avoir agit sous la
contrainte, forcés, par exemple, de dérober le contenu d'une caisse ou de
tuer pour de l'argent. Bien sûr, toute personne qui se compromer par la transgression de l'ordre social et des lois de la morale publique ressentira, tout au début, de la douleur et éprouvera un remord de la conscience. Mais, par la répétition de l'acte, elle s'habituera progressivement et n'aura plus aucun remord, elle oubliera même la gravité d'un tel acte. De ce fait, cette personne ne ressentira, au plus profond de son âme, plus aucune douleur ou repentir. Le Coran compare ces personnes qui ont perdu la raison et ne sont plus conscientes des dangers que peuvent représenter pour eux et pour la société leurs actes empreints d'égoisme et d'intérêts personnels, car elle ne font plus la différence entre le bien et le mal, à un troupeau errant, sans berger pour le guider. "Ils ont des coeurs par où ils ne comprennent pas, ils ont des yeux par où ils ne voient pas, ils ont des oreilles par où ils n'entendent pas: ce sont de vrais bestiaux et plus égarés encore. Tels sont les inattentifs."34 |