Chapitre XV


Limites et incapacités de L'homme

Si l'homme approfondissait quelque peu sa pensée et considérait la réalité avec plus de largeur de vue, il réaliserait que devant les vastes dimensions de la géographie de l'être et de son évolution, sa propre puissance ne devrait pas entrer en ligne de compte.
Les connaissances que l'humanité a acquises par des efforts inlassables au sujet de la nature ne valent rien quand on les compare à ce qui reste mystérieux et inconnu, bien que les sciences aient accompli des progrès grandioses.
Dans les questions relatives au passé lointain de l'humanité, qui sait si des milliers, voire des millions de genres humains ou supérieurs à l'homme sont venus sur terre avant de disparaître? et qu'en sera - t - il dans l'avenir?

Ce que les scientistes contemporains appellent savoir et science et qu'ils considèrent comme réalité, est un ensemble de lois relatives à un domaine donné de l'univers.

Le résultat de tous ces efforts et de toutes ces peines de la science moderne est comme la lueur que dégagerait dans une nuit obscure, une faible bougie, placée au milieu d'une plaine immense dont on n'apercevrait pas les limites.

Si nous tentions de reculer de plusieurs millions d'années, notre chemin ne serait qu'obstrué d'un voile d'imprecision, ce qui confirme la faiblesse et l'insuffisance humaine devant la grandeur de l'oeuvre naturelle. Nous ne savons rien de juste quant au début de notre apparition sur terre, et nous ne savons rien non plus au sujet de notre avenir.
D'autre part, on ne peut pas croire que les conditions de vie n'existent exclusivement que sur notre petite planète, puisque de nos jours le savants sont d'avis que le domaine de la vie est bien plus large. Des millions de planètes existent dans le champ de vision de nos téléscopes, et pourtant il en existe bien plus d'autres!

Camille Flammarion, imaginant un voyage cosmique vers l'infini, écrit dans un de ses livres:
"Puis encore mille ans, puis dix mille ans, et encore cent mille ans, à la même vitesse, sans réduire le régime de l'engin, et sans pâtir du vertige, et toujours droit devant nous, à la vitesse de 3001000 kilomètres par seconde. Supposons qu'à cette vitesse, nous parcourions une période d'un millions d'années, serions nous en vue des confins du monde visible?

Non, il est encore d'autres immenses espaces à traverser. Mais là aussi, de nouvelles étoiles brillent à l'extrêmité du ciel. Nous nous dirigeons vers elles. Les atteindrons - nous?
Puis de nouveau quelques centaines de millions d'années; encore de nouvelles découvertes, une nouvelle grandeur et un nouvel éclat, un nouveau monde, de nouvelles terres, de nouvelles choses, de nouveaux êtres, où en est la fin? Les horizons ne sont jamais fermés, jamais un ciel ne sera un obstacle devant nous. Toujours l'espace, toujours le vide, où sommes - nous? Quel chemin avons - nous parcouru? Nous sommes encore au même point. Partout c'est le centre, nulle part est la circonférence.

Oui, tel est l'univers infini qui s'ouvre devant nous, mais son exploration n'a pas encore commencé. Nous n'avons rien vu. De peur, nous rebroussons chemin. Nous tombons épuisés de ce voyage sans résultat. Où tombons - nous? Nous pouvons tomber pendant une éternité dans le tourbillon sans jamais atteindre à son fond, tout comme nous ne sommes pas arrivés à son sommet. Le nord devient sud? Où est le ciel? Il n'y a ni couchant, ni levant, ni bas ni haut, ni droite ni gauche, de tout côté qu'on regarde il y a l'infini. Dans cet infini notre monde est comme une île dans un grand archipel se trouvant dans un océan sans fin. Et l'âge de toute l'humanité, avec tout l'orgueil qu'elle puise dans son passé politique et religieux, et même l'âge de notre terre avec toute sa grandeur, ne sont qu'un rêve éphémère."

Si l'on voulait réécrire l'ensemble des connaissances et des oeuvres produites par des millions de savants dans des millions de livres, il suffirait d'une quantité d'encre n'excédant pas la capacité d'un pétrolier moyen, alors que pour préparer une liste de tous les êtres de l'univers, sur la terre et dans les cieux, ceux du passé lointain et ceux de l'avenir infini, en un mot pour écrire tous les mystères de l'existence, toutes les mers n'y suffiraient pas si elles se transformaient en encre.

Dis: "Si la Mer était une encre pour écrire les
décrets de mon Seigneur, et si même Nous lui
ajoutions une Mer semblable pour la grossir,
la Mer serait tarie avant que ne soient taries
les décrets de mon Seigneur."

Coran, Sourate 18, verset 108

Selon le professeur Ravaillet: "Pour vous donner une image complète de cet univers, il suffit que vous sachiez que le nombre de galaxies, dans l'immense espace de la création, est supérieur au nombre de grains de sable se trouvant sur les plages de toutes les côtes du monde."28

En envisageant ainsi nos connaissances et le domaine de notre ignorance, nous créons les conditions nous permettant de sortir du cadre étroit de la vie. Nous prenons conscience de notre petitesse, et nous nous inclinons humblement devant la majesté de la création, dont nous entreprenons l'étude avec modestie.

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