Chapitre II Qui est digne d'adoration? Tel que le définit le Coran, le Seigneur du monde réunit toutes les conditions idéales de l'être digne d'adoration. Il est le créateur de l'amour et de la beauté, la source de toutes les énergies, un océan profond et immense dont la moindre vague se joue même des nageurs les plus doués. C'est Lui qui retient les cieux et la terre, et les empêche de s'effondrer. S'Il détournait un seul instant son regard bienveillant de l'univers, celui ci exploserait et retournerait au néant. Par conséquent, la moindre chose qui existe ne doit son existence qu'à Lui. Il est le dispensateur de toutes les faveurs et de tous les bonheurs,
et le détenteur de notre libre - arbitre. Lui qui est conscient et informé du moindre mouvement se produisant sur la terre et dans tout l'univers, peut très bien déterminer la ligne à suivre pour le bonheur, et mettre en plan le mode de vie et les rapports de l'homme, parce qu'Il connaît nos intérêts réels. En se conformant au programme fixé par Dieu, on s'assure du bonheur et de la promotion. Comment se peut - il que l'homme puisse à la fois sacrifier son âme
même pour la vérité et la justice, et se détourner de leur source et de
leur manifestation? Le facteur originel de l'adoration est la capacité de dispenser des faveurs, la conscience des possibilités, des besoins, des réserves, des aptitudes et des énergies dans le corps et l'âme de l'homme. Or cela est propre à Dieu, car toute l'existence est dépendante de Lui et c'est vers Lui que se dirigent les caravanes successives des créatures. Son commandement est permanent sur le monde. Par conséquent, le culte et l'obéissance absolue lui sont réservés exclusivement, car sa présence glorieuse est perçue à chaque instant par les coeurs de tous les êtres. Des êtres comme nous dénués de force ne sont pas d ignes d'adoration, et ne méritent pas de s'attribuer ce qui est uniquement à Dieu. D'autre part l'homme lui - même a suffisamment conscience de sa person nalité et de son rang pour accepter de s'incliner devant des créatures périssables. Dans l'univers aux frontières infinies, seul Dieu mérite d'être adoré
et loué par l'homme. La quête de Son agrément et de Sa satisfaction doit
avoir la priorité chez tout être aimant dieu. Cette goutte qu'est l'homme
ne sera à l'abri des tempêtes de la déviation et de la corru ption que si
elle rejoint le grand océan dans lequel elle trouvera son identité
authentique, et accédera à l'éternité. Dieu sera alors pour l'homme celui
qui donne un sens au monde, et par qui s'expliquent tous les évènements,
et à partir de là, il comprendra d'où viennent l'ampleur et l'étroitesse
des univers des hommes. Comment peut - on considérer comme incontestable l'aspect spirituel et naturel de l'homme avec ses penchants, tendances et besoins qui naissent de son intérieur et sont causes de l'éclosion des aptitudes, et d'autre part négliger totalement ce qui est conforme avec notre nature (Fitrat), notre tempéramment, et dont les attributs offrent une réponse à tous nos voeux matériels et spirituels, et sont le plus puissant. * * * Un examen approfondi nous permet de conclure que les créatures
innombrables, l'amour et les autres instincts qui sont ancrés en nous,
aboutissent tous à une même et unique source, qui est Dieu et dont la
réalité et l'essence conditionnent toutes les réalités et essences de
l'univers. L'existence se dirige vers la même source dont elle est issue,
qui est seule digne d'amour, et qui capte tous les sentiments et toutes
les pensées des hommes auxquels elle se fait connaître. L'être idéal dont nous sommes en quête, et vers lequel nous nous
dirigeons, ne peut forcément pas être notre but ultime et notre aspiration
totale, s'il ne connaît pas nos douleurs et les réalités du monde, et s'il
est incapable de répondre à nos voeux et aspirations, étant comme nous
plein d'insuffisances et de faiblesses, et étant doté d'une même essence
que la nôtre.
Coran, sourate 7, verset 194 Par conséquent, rien ne justifie qu'on puisse s'incliner devant autre que Lui, ou qu'on puisse orienter notre attention vers autre que Lui, puisque tout ce qui est autre que Lui n'a pas le moindre effet sur notre condition et notre destin. Parce que si un dieu mérite qu'on l'adore et qu'on lui voue un amour et qu'on attende de lui qu'il nous élève au sommet du bonheur, il faut qu'il soit forcément exempt de toute insuffisance, et- qu'il rayonne en permanence sur les créatures en leur donnant vie et soutien, et que sa beauté subjugue tout homme capable de la sentir et de la percevoir. Il faut qu'il soit détenteur de la force absolue, qu'il apaise la soif de l'esprit, car se frayer la voie de sa connaissance ne consiste en rien d'autre qu'à arriver à la source authentique de la nature humaine. Autrement, si l'idôle de notre choix ne présente de supériorité qu'en
certains aspects, et qu'elle ne satisfait que certains de nos besoins,
elle cesse d'être une idôle dès qu'elle nous fait parvenir à nos buts.
Elle cesse d'exercer son attraction, et devient un obstacle à notre
progrès. Si aussi, cette idôle est en - dessous de nos aspirations, elle ne sera jamais un facteur de progrès et de réforme. Au contraire, elle nous entraînera vers la décadence et l'avilissement. L'homme est dans ces conditions comparable à l'aiguille d'une boussole qui n'est plus capable de retrouver le nord, et qui par conséquent ne saura conduire qu'à l'infortune, la perdition. * * * |