CHAPITRE 1
L'Imam est pour l'ensemble des croyants musulmans un guide et un éclaireur; ceux qui le suivent profitent de la force de son intelligence et de sa perspicacité; ils règlent leur comportement sur le sien, et obéissent à ses ordres. L'imamat est une notion très large, embrassant à la fois le sens de l'autorité spirituelle, "marja'iyyat", et celui d'autorité politique. Après la mort du Prophète, l'Imam fut chargé d'enseigner aux hommes les sens du Coran, les réalités de la religion et les pratiques sociales, et d'être leur directeur dans tous les domaines. Cette direction des affaires des hommes ne consiste, au fond, que dans la concrétisation des objectifs de l'islam pour l'humanité et mettre en pratique la religion fondée par l'Envoyé de Dieu. Parfois le mot "imam" est pris dans un sens large, pour désigner la personne qui a en mains les rênes des affaires dans le domaine politique ou social. Mais lorsqu'un homme a une conscience en complète conformité avec le message religieux, et qu'il remplit toutes les conditions pour diriger politiquement et intellectuellement, et qu'il est le meilleur homme de la société musulmane, en mesure de transmettre aux hommes les préceptes de la Chari'at, dans tous les domaines, et est en mesure de préserver la personnalité islamique de toute déchéance, un tel homme est l'exemple de l'Imam véritable absolu, et de chef spirituel et temporel des hommes. Ainsi, l'Imam se présente comme une personne dotée d'une dimension divine et unitariste. Et son action, en rapport avec Dieu et la Création, et dans l'exécution des prescriptions rituelles, morales et sociales de la religion divine, est parfaite et harmonieuse. C'est lui qui est à même d'orienter le mouvement des hommes vers la perfection dans l'harmonie et l'unité. Il incombe aux croyants de lui obéir dans cette mission, de voir en lui l'autorité en toute chose,et le critère éloquent de la parfaite édification individuelle ou sociale, et le seul exemple parfait de vertu et de grandeur. * La plupart des docteurs sunnites sont de cet avis que l'imamat et le
Califat sont une seule et même chose. Ces deux termes sont synonymes, et
expriment la grande responsabilité sociale et religieuse que le peuple
délègue à la personne du Calife, en l'élisant à la dignité de chef des
musulmans. Ce qui, ici, constitue la condition de la prise en main des affaires est la capacité et la compétence dans l'art de gouverner, afin que les peines légales soient appliquées aux coupables, que les atteintes aux droits des gens soient prévenues et empêchées, ainsi que toutes les vélléités d'injustice de toutes sortes. D'autre part, il devra être capable, par le moyen de la force militaire, d'assurer la défense des frontières du territoire islamique contre toute agression, et de lutter contre les déviations et l'athéisme lorsque les moyens de la perscrasionne suffisent pas. De ce point de vue, si le gouvernant n'a pas le savoir nécessaire en
matière religieuse, ou encore s'il transgressait lui-même les règles de la
piété, et qu'il se rendait coupable de péchés et de vices, cela ne serait
pas grave. C'est sur une telle vue des choses que s'appuie un grand savant
sunnite, en parlant du calife. * Si vraiment Dieu avait voulu que le sort de la communauté musulmane
tomba entre les mains de gouvernants incapables, injustes et tyranniques,
il n'y aurait eu aucune nécessité d'envoyer un prophète, ni de révéler les
prescriptions nécessaires à l'édification de la société
musulmane. Un intellectuel sunnite, le Dr Abdel aziz al-Dowri écrit: "Il est légalement permis qu'un homme soit à la tête du califat sans en
avoir les qualités requises, même s'il existe un autre homme qui en
remplit les conditions; et si un homme a été choisi, on ne peut pas
l'écarter du pouvoir pour la raison qu'il existe un autre plus compétent
et meilleur que lui." Quant aux penseurs de l'islam et aux réformateurs de la société, les partisans des Imams de la justice, les preuves de Dieu, les guides de la Création, ils sont appelés "hérétiques" (râfizi), et déserteurs de la tradition du Prophète de Dieu. Qu'adviendrait-il de la religion de Dieu si le droit était reconnu à des gouvernants tout à fait étrangers à l'esprit de l'islam et foulant aux pieds les lois célestes, de prendre la direction des affaires des croyants, et si ces derniers se voyaient contraints de leur obéir en tout? Peut-on alors penser que la fidélité à la Loi prophétique se résume à cela? Une telle façon de penser n'aurait-elle pas comme seul résultat de reconnaître officiellement le droit illimité des tyrans et des oppresseurs? * Dans l'optique chi'ite, l'imamat est une sorte de direction divine et une responsabilité confiée par Dieu, comme la prophétie, avec cette différence que le prophète est le fondateur d'une religion et l'Imam en est le gardien. Il est du devoir du peuple de le prendre pour exemple et de s'inspirer de lui dans toutes les dimensions de la vie. La nécessité se fit sentir pour la communauté musulmane, dès la mort du Prophète, d'une personnalité forte, capable, de grande vertu et pure de tout péché, afin de poursuivre la voie du fondateur de la Loi islamique. En demeurant attentif aux évènements, et conscient des dangers de la déviation, il sera en mesure de faire profiter tout le peuple de ses vastes connaissances de la religion, dans tous les domaines, et de maintenir vivante la flamme du monothéisme. L'imamat et le califat sont indissociables, comme sont indissociables dans l'Envoyé de Dieu les deux fonctions de prophète et de gouvernant. Car l'islam spirituel et l'islam temporel sont les parties d'un même tout. Mais au cours de l'histoire, la puissance politique des musulmans a été séparée de la puissance spirituelle. Si un homme juste, pieux et capable n'était pas à la tête des musulmans et s'il ne leur servait pas de guide et de modèle, la situation ne serait plus propice à l'instauration de la justice, et à l'épanouissement moral et religieux, et les conditions ne seraient plus garanties pour que la religion joue pleinement son rôle. Pour signifier l'impact de l'action des gouvernants sur leurs peuples,
Ali, l'Emir des Croyants a dit: En outre, le besoin qu'éprouve la société d'un dirigeant excellent en tout, est un besoin normal et naturel. De même que l'islam a satisfait par des lois adéquates les besoins individuels et sociaux, aussi bien temporels que spirituels, de même il faudrait que son besoin d'un dirigeant soit satisfait de façon conforme à la nature humaine, et qu'il soit aussi conforme à l'attente des hommes. * Comment Dieu qui a pourvu les êtres humains en instruments nécessaires ou accessoires, afin de leur permettre de surmonter leur insuffisance intrinsèque et de progresser vers la perfection, pourrait-il faire exception dans ce domaine très sensible, et priver les hommes de l'instrument sans lequel leur promotion matérielle et spirituelle serait impossible? Peut-on penser que Dieu puisse priver l'homme des moyens les plus
fondamentaux, et lui refuser cette grâce? Le Prophète de l'islam a dit: * * * |